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Article écrit le 13/12/2023, car les choses évoluent très vite !

C'est quelque chose de très curieux. En matière d'espace, et en moins de 20 ans, la Chine a rejoint le niveau technique et opérationnel des États-Unis. On pourrait presque dire qui les ont dépassés. Mais pratiquement personne n'en parle, jamais dans les médias généraux, extrêmement peu dans les médias d'astronomie, tout aussi extrêmement peu dans le milieu de l'espace.

Oui, on peut le dire actuellement, la Chine a dépassé les États-Unis au niveau du programme spatial. Au niveau sondes, satellites, et astromobiles, on peut dire, qu'à la louche, les deux pays sont à égalité. Mais la Chine dispose actuellement de plusieurs lanceurs alors que les États-Unis n'en possèdent plus un seul et doivent faire appel au privé (Elon Musk). Dès 2003 la Chine a procédé à un vol habité et n'a cessé de le perfectionner, alors même que les États-Unis, actuellement, n'en sont plus capables. Quant à l'Europe…

À préciser que la collaboration de la Chine avec l'Union soviétique puis la Russie lui a permis de réaliser de très importants progrès dans tous les domaines spatiaux.





Ainsi donc, la Chine a terminé l'assemblage complet de sa station spatiale en novembre 2022. Elle est appelée CSS (China Space Station) ou Tiangong ("Palais Céleste"). La photo d'accueil du présent article (rappelée à droite) est celle de la CSS prise par les trois taïkonautes du vaisseau Shenzhou 16 en train de revenir sur Terre mois d’octobre 2023.

Avec son programme de modules orbitaux Tiangong, la Chine a appris à vivre, à travailler dans l'espace. Elle a aussi appris à maîtriser la technologie nécessaire pour construire et exploiter une station spatiale, en service maintenant. Le premier élément a été lancé par Long March 5 (voir plus loin "Les lanceurs chinois), seul lanceur capable d'envoyer des modules aussi lourds en orbite.

D'une masse de 60 à 70 tonnes, cette station peut accueillir des équipages de trois taïkonautes tous les 3 à 6 mois, ou des équipages de six personnes pour des périodes plus courtes. Elle est conçue pour une durée de vie d'au moins 10 ans, voir 15. Elle produit 27 kilowatts d'énergie dont 12 seront utilisés pour les expériences scientifiques.

Tiangong vole à une altitude moyenne de 400 kilomètres avec un apogée (distance la plus éloignée de la Terre) à 450 kilomètres et un périgée (distance la plus proche de la Terre, ben oui…) de 340 kilomètres, ce qui est à peu près à la même altitude que la Station spatiale internationale (ISS). Par contre, son inclinaison à 41 ou 43° est différente de celle de l'ISS qui est inclinée de 51,6°.

Puisque nous sommes dans les comparaisons rapides, ci-dessous un schéma comparant les 3 stations spatiales : l'ISS, la CSS, et MIR (cette dernière, après avoir tourné autour de la Terre pendant une quinzaine d’années à une orbite comprise entre 296 km et 421 km d'altitude, a volontairement été détruite par les Russes en mars 2001) :

 













Tiangong, en forme de T, s'est inspiré de la station soviétique MIR. Son architecture est très différente de celle de l'actuelle ISS. Elle compte 3 modules principaux, dont Tianhe-1 (Harmony of the Heavens). Ce module long de 18 mètres et d'une masse au décollage de 22 tonnes est l'élément central et la pièce maîtresse de l'ensemble. Il sert de poste de pilotage et de contrôle, et est utilisé comme module d'habitation et lieu de travail. Il est doté de cinq ports d'amarrage, d'un bras robotique et d'un sas pour sortir dans l'espace. Il est également équipé de plateformes externes pour y loger des instruments ou des expériences.

Les deux autres éléments principaux sont les modules Wentian (Quest for the Heavens) et le Mengtian (Dreaming of the Heavens). De taille et de masse similaires (14 mètres et 22 tonnes), ils sont amarrés de part et d'autre de Tianhe-1 dans une configuration en T. Wentian est équipé d'un bras robotique et d'un sas de sortie tandis que le Mengtian dispose d'un port d'amarrage.














Enfin, grande particularité, un télescope spatial (module optique), dénommé XunTian, volera à quelques encablures de la station sur la même orbite afin de faciliter les opérations de maintenance.

Son miroir de deux mètres de diamètre sera légèrement plus petit que celui du télescope spatial Hubble (2,4 mètres) mais son champ de vision sera bien plus grand. Comme Hubble lors de sa mise en service, les concepteurs de XunTian promettent de grandes avancées scientifiques. Si nécessaire, il pourra s'amarrer au module CM pour des opérations de ravitaillement, de maintenance et de remplacement d'instruments.























Ci-dessous, la fusée Longue-Marche 2F transportant le vaisseau spatial Shenzhou-13, avec le deuxième équipage de trois taïkonautes vers la nouvelle station spatiale chinoise, qui décolle du centre de lancement de satellites de Jiuquan, dans le désert de Gobi, au nord-ouest de la Chine, le 15 octobre 2021.
















Au début de leur programme spatial, les chinois ont conçu les lanceurs Longue Marche 2, 3 et 4. Ils ont ensuite construit la fusée légère Longue Marche 6 et les fusées de moyenne puissance Longue Marche 7 et 8. Mais leur plus gros lanceur reste la fusée Longue Marche 5 qui est un lanceur lourd capable de placer une charge utile de 25 tonnes en orbite basse et de 13 tonnes en orbite de transfert géostationnaire.





















Le 29 septembre 2011, au moyen d'une fusée Longue-Marche-2 F améliorée, la Chine a satellisé le laboratoire habitable Tiangong-1 (« Palais céleste »), placé sur une orbite basse de 350 kilomètres d'altitude, dans le but de tester les technologies en vue d'une station spatiale.

Tiangong-1 inaugure la deuxième étape du Projet prioritaire 921 des vols spatiaux habités qui fut décidé le 21 septembre 1992 par les autorités de Beijing. Ce programme à long terme, en trois phases, a pour objectif la construction d'une station spatiale permanente à l'horizon de 2020. Sa réalisation est confiée à la C.A.S.C. (China Aerospace Science & Technology Corp.), qui gère l'ensemble des activités de la Chine dans l'espace.

La phase 921-1, qui s'est déroulée de 1999 à 2008, a vu la maîtrise de la technologie d'un véhicule spatial habité, le Shenzhou (« Vaisseau des esprits »), de 8 tonnes environ inspiré du Soyouz russe mais possédant une cabine plus spacieuse et un habitacle mieux équipé. Le taïkonaute Yang Liwei est resté sur orbite pendant 21 heures le 15 octobre 2003, à bord de Shenzhou-5. Pour réussir cette étape, la Chine a investi 35 milliards de yuans (4,1 milliards d'euros).

Avec le démarrage de la phase 921-2, le C.M.S.E.O ((China Manned Space Engineering Office) vise l'occupation permanente du milieu spatial grâce à l'assemblage de modules sur orbite, l'emploi de vaisseaux de ravitaillement automatique, l'expérimentation de systèmes de support de vie à bord, notamment d'équipements pour le recyclage de l'air et de l'eau, en vue de séjours de plusieurs semaines.

Le C.M.S.E.O. prévoit une vingtaine de missions durant la décennie 2010, avec les lancements de modules automatiques Tiangong et de vaisseaux habités Shenzhou. L'investissement de 300 milliards de yuans (35 milliards d'euros) serait égal à près de dix fois celui de la phase 921-1.

La Chine a procédé à 64 lancements en 2022, un record, et 60 en 2023.

Une cadence de lancements très élevée qui traduit les ambitions de son programme spatial sur lequel elle s’appuie et compte pour maintenir son statut de grande puissance mondiale.

En 2022, la Chine a donc battu un record de lancements, terminé la construction de sa station spatiale et réalisé deux vols habités (Shenzhou 14 et 15) amorçant une occupation qui devrait devenir permanente de son complexe orbital.

Ces vols ne résument évidemment pas la très grande variété des lancements effectués tout au long de l'année écoulée. Soixante lancements, c'est autant de missions envoyées dans l'espace. Cela traduit la très grande maturité du programme spatial chinois dans son ensemble.











Incontestablement, la Chine fait désormais parti des grandes puissances de l'espace. A l'heure où sont écrites ces quelques lignes (13/12/2023), et concernant les vols habités, elle n'a d'égale actuellement que les russes (programme Soyouz encore aujourd'hui en mesure d'envoyer des hommes dans l'espace), les américains ayant disparu de la circulation et les européens n'ayant jamais existé. Sa nouvelle station spatiale Tiangong va être, avec celle des russes, la seule du fait de la désintégration programmée par les américains de l'ISS en 2031 (sauf s'ils jouent les prolongations !).

En effet, les russes (Agence Roscosmos) ont programmé de construire seuls, comme les chinois, une future station spatiale. Elle sera baptisée Ross (Russian Orbital Space Station) et ne sera pas occupée en permanence. Elle sera installée sur une orbite différente de celle de l'ISS avec une inclinaison à 97° au lieu des 51,6°. Une inclinaison qui permettra la couverture totale du territoire russe contre seulement 20 % par l'ISS. Le premier module sera lancé en 2028, et sa construction est déjà en cours.

Enfin, trois entreprises privées chinoises ont effectué quatre lancements avec leurs propres modèles l'année dernière, mais deux d'entre eux se sont soldés par des échecs.

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