Pluton n'aura jamais autant fait parler d'elle. Non pas de par ses caractéristiques intrinsèques et dans le système solaire, mais par la polémique mondiale qui la concerne. Dans ce modeste article, ton serviteur va d'abord te parler de Pluton, ce qui est le plus intéressant, et t'expliquez ensuite pourquoi une telle polémique dans le monde de l'Astronomie.
Je dois te l'avouer, Pluton créé en moi un sentiment bizarre. C'est la dernière anciennement planète (actuellement planète naine, objet de la polémique évoqué ci-dessous) du système solaire. C'est un objet extrêmement lointain de notre système solaire, le plus éloigné au niveau planète. Il est mystérieux, a été peu exploré, créé un sentiment étrange. Quand j'étais gamin (enfin, autour de mes 25 ans) j'avais créé un petit site Internet entièrement consacré à Pluton (qui était encore, à l'époque, la 9ème planète du système solaire).
Pluton est donc actuellement, officiellement, une planète dite naine. Considérons-la comme telle puisqu'en a décidé officiellement l'Union astronomique internationale (UAI) en 2006. Dont acte.
Pluton est le fils de Saturne et de Rhéa. Pas de chance, lors du partage du monde, il reçut comme royaume les enfers et le monde sous-terrain, ce dernier étant considéré comme la destination finale des âmes des morts. Triste…On l'appelait aussi "summus manium", le souverain des mânes ou des ombres. On mettait sur son compte, les tonnerres qui grondaient pendant la nuit.
Homère et Hésiode le décrivent comme l'« impitoyable », le « détesté » et le « monstrueux » Hadès. Sympa.
Comme Pluton était dieu sombre et taciturne habitant un royaume qui ne respirait pas la joie, il ne trouva point de femme qui voulût le partager avec lui, il fut donc obligé d'user de surprise, et d'enlever de force Proserpine pour qu'elle le rejoigne dans les enfers. Ben oui.
Pluton (nom romain) a été identifié à Hadès des grecs et ne possède pas de légende qui lui soit propre.
Bon, la dénomination de Pluton, venant de la mythologie grecque, a été proposé par une jeune Anglaise de 11 ans (à l'époque, décédée en 2009), Venetia Burney.
Le nom est joli, certes, mais quand on gratte ce qui se cache derrière, brrrrr…
Située à une distance moyenne de 5,9 milliards de km du Soleil – entre 4,3 et 7,4 milliards de km, soit entre 30 et 49 UA du fait d’une orbite très inclinée -, la planète naine Pluton entre dans l’orbite de Neptune lorsqu’elle est à son périhélie – le point de sa trajectoire le plus proche du Soleil.
L’astre se situe dans la ceinture de Kuiper, une zone d’objets célestes qui s’étend au-delà de l’orbite de Neptune, un peu comme la ceinture d’astéroïdes qui sépare Mars de Jupiter. Il ne satisfait pas à la dernière condition qui consiste à avoir nettoyé son orbite.
L'orbite de Pluton est très intrigante et caractéristique. Elle est particulièrement elliptique et met 248 années terrestres de révolution (faire le tour du Soleil), là où la Terre n'en met qu'une. Ainsi, Pluton se trouve à une distance très différente du Soleil selon la zone de son orbite où elle se trouve. Son orbite étant fortement excentrique, cette distance varie le long de son parcours autour du Soleil, éloignant Pluton de notre Étoile jusqu'à près de 50 ua à son aphélie (point de l'orbite le plus éloigné du centre), et la rapprochant de notre Soleil jusqu'à près de 30 ua à son périhélie -- pour chaque période orbitale, Pluton passe ainsi une vingtaine d'années à orbiter plus proche du Soleil que Neptune !
Pour rappel, Neptune est à 4 495 100 000 kilomètres du Soleil (30,06 u.a) et Pluton à 5 900 140 000 kilomètres du Soleil (39,44 u.a). Pour la petite histoire, la lumière met 3 minutes pour atteindre Mercure, première planète du Système Solaire, et plus de 5 heures pour atteindre Pluton. Tiens, puisqu'on y est, voici le temps que met la lumière pour atteindre les différentes planètes et Pluton.
Son atmosphère est à l'état gazeux lorsque la planète est proche du Soleil et repasse à l'état solide lorsqu'elle s'en éloigne.
L'ensemble des planètes du système solaire ont des orbites peut décalées par rapport à celle de la Terre prise en référence et appelée le plan écliptique. Mais notre coquine Pluton est inclinée de 17° par rapport au plan de l'écliptique. C'est la seule à être autant décalé.
Dans le gif d'animation ci-dessous, en rouge l'orbite de Pluton, elliptique, par rapport à celle de la Terre (point bleu) tournant autour du Soleil central.
Le texte en italique rouge dans le cadre ci-dessous donne quelques précisions supplémentaires un peu techniques il est vrai. Tu peux ne pas le lire, il n'influencera pas la suite de la lecture de l'article.
Le diamètre de Pluton est de 2 376,6 kilomètres. Elle est ainsi plus petite que la Lune qui mesure 3 474,8 kilomètres de diamètre. Cette petite taille et son éloignement par rapport à la Terre font de Pluton un objet particulièrement difficile à observer et à étudier depuis notre planète.
Pluton évolue sur une orbite située à plusieurs milliards de kilomètres du Soleil. Elle reçoit extrêmement peu de chaleur et la température qui y règne en moyenne est d’environ -230 °C. Cette planète naine est donc un petit corps glacé aux confins du système solaire.
Pluton est une petite planète (naine) glacée composée de roches, de glaces de méthane et de glaces d’azote. Sa composition interne est encore assez mal connue des scientifiques. Son atmosphère est très fine et contient 90 % d’azote, 10 % de monoxyde de carbone et des traces de méthane. Lorsque Pluton se trouve à proximité du Soleil, son atmosphère est sous forme gazeuse mais se solidifie et passe à l’état de glace lorsque la planète avance sur son orbite elliptique et s’éloigne ainsi du Soleil, recevant donc moins de chaleur.
Pluton, comme la Terre, tourne sur elle-même, n’offrant pas toujours la même face au Soleil. Mais attention, une journée sur Pluton dure un peu plus de 6 jours contre 24 heures sur Terre. Cependant, la notion de jour est toute relative puisque Pluton se trouve tellement éloignée du Soleil que la lumière que la planète naine reçoit est bien plus faible que celle que nous connaissons sur Terre. Au maximum, la luminosité qu’elle connait équivaut à la lumière que nous recevons sur Terre après le coucher du Soleil lorsqu’il ne fait pas encore totalement noir.
Pluton tourne sur elle-même plus lentement que notre planète. Elle met 6 jours, 9 heures et 17 minutes à faire un tour complet. Ainsi, une journée dure plus de 6 jours terrestres.
La durée de révolution d’une planète du système solaire est le temps qu’il faut à cette dernière pour réaliser un tour complet autour du Soleil. Le temps de révolution de Pluton est particulièrement long puisqu’elle met 248 ans à faire le tour du Soleil. Un an sur Pluton dure donc 248 ans terrestres. Ainsi, depuis que Pluton a été découverte en 1930, la planète naine n’a toujours pas réalisé une révolution complète !
La distance qui sépare la Terre de Pluton est variable puisque Pluton suit une orbite elliptique. Lorsque les deux planètes sont sur leur point le plus proche, environ 4,29 milliards de kilomètres les séparent. Au contraire, lorsque les deux planètes sont dans la configuration qui les éloigne le plus, elles se situent à 7,55 milliards de kilomètres l’une de l’autre, comme expliqué plus haut.
Pluton ne suit pas une orbite circulaire autour du Soleil, son mouvement est de forme ovale. On dit que son orbite est elliptique. Selon le point de l’orbite où elle se trouve, Pluton n’est pas toujours à la même distance du Soleil. Lorsqu’elle s’en rapproche au maximum, elle se trouve à 4,41 milliards de kilomètres de notre étoile. En revanche, lorsqu’elle s’en éloigne, 7,40 milliards de kilomètres peuvent les séparer.
La vie sur Pluton semble difficile à envisager pour différentes raisons. Tout d’abord, la couche de gaz qui entoure la planète naine est irrespirable pour nous puisqu’elle ne contient pas de dioxygène. La planète est également un monde particulièrement froid à cause de la distance qui la sépare du Soleil. Ainsi, il y règne une température d’environ -230 °C. Cette distance au Soleil a pour autre conséquence la très faible luminosité régnant à la surface de la planète naine. Vivre sur Pluton, c’est donc vivre dans une quasi-nuit perpétuelle au sein d’un environnement glacé.
Extrêmement difficile à atteindre du fait de son éloignement, Pluton est la planète qui a mis le plus de temps à être survolée et explorée par les missions de la NASA.
La seule sonde, à l'heure où sont écrites ces lignes, soit juin 2023, à avoir survolé Pluton est New Horizons, lancée en 2006 par la NASA. Après avoir survolé Jupiter en 2007, New Horizons se lance dans un périple de 8 ans et atteint le système plutonien en 2015. Elle apporte ainsi des informations cruciales sur la géologie et l'atmosphère de Pluton.
Depuis la découverte de Pluton, les différents outils mis au point nous ont permis d'obtenir des images de plus en plus précises de Pluton et de son satellite Charon.
Plus de détails : le texte en italique rouge dans le cadre ci-dessous donne quelques précisions supplémentaires de l'exploration de Pluton par la sonde New Horizons. Tu peux ne pas le lire, il n'influencera pas la suite de la lecture de l'article.
Pluton possède cinq satellites . Nix et Hydre découvert en 2005, Kerbéros découvert en 2011 et Styx découvert en 2012. En juin 2014, le télescope spatial Hubble découvre un nouvel objet appelé Arrokoth (2014 MU69)
Mais le plus gros satellite s'appelle Charon découvert en 1978. D'un diamètre de 1 212 kilomètres, cette lune est deux fois moins grande que Pluton. En revanche, sa masse est à peine inférieure à celle de la planète naine ce qui entraîne un drôle de ballet céleste entre les deux objets.
D'une manière générale, les satellites sont placés en orbite autour de leur planète car celle-ci possède une masse largement supérieure à celle de son satellite et exerce donc sur ce dernier une force de gravité bien supérieure à celle que le satellite exerce sur elle. Dans le cas de Pluton et Charon, les deux objets s'attirent mutuellement avec une force semblable puisqu'ils présentent presque la même masse. Ainsi, le point autour duquel ils tournent (le barycentre des deux corps se trouve au-delà de la surface de Pluton, à un peu plus de deux rayons plutoniens) se trouve entre les deux objets. Pluton et Charon tournent ainsi l'un autour de l'autre.
L'orbite de Charon est inclinée de 118° par rapport à celle de Pluton dans son mouvement autour du Soleil. Au cours de son mouvement autour de Pluton, Charon passe devant et derrière la planète. Ces éclipses et occultations, observées depuis 1985, ont permis de mesurer les diamètres de ces deux corps ainsi que leurs pouvoirs réflecteurs. Charon gravite à environ 19.000 kilomètres de Pluton et son diamètre accuse environ 1.190 kilomètres. La période de révolution du satellite (6,387 jours) est égale à sa rotation mais aussi à la période de rotation de Pluton. En d'autres termes, Charon est immobile dans le ciel de Pluton (comme la Terre dans le ciel de la Lune) et présente toujours la même face à Pluton (comme la Lune dans le ciel de la Terre). Et réciproquement : les deux corps se font donc face comme deux danseurs qui tournent en regardant dans les yeux.
L'albédo de Pluton est de l'ordre de 50 % et celui de Charon de 37 %. Ces deux corps ont une densité de l'ordre de 2.
Pourquoi Pluton a été déclassé comme planète et mise comme planète naine ? En voilà une bonne question, ma cousine ! Et cette décision en a fait, des malheureux !
Il y a un organisme international qui est fait pour cela (et d’autres choses évidemment) qui s’appelle l’Union Astronomique Internationale (UAI). C’est lui le grand maître officiel. Après moult recherches et moult débats en son sein, il en est sorti la définition officielle d’une planète comme étant un corps céleste :
- qui est en orbite autour du Soleil
- qui a une masse suffisante pour que sa gravité dépasse les forces du corps solide et qu’il se maintienne par équilibre hydrostatique sous une forme quasi-sphérique
- qui a nettoyé le voisinage autour de son orbite, non pas avec de l’eau de Javel, mais en faisant le vide sur son orbite comme étant la seule a bénéficier
Mais, mon bon cousin, l’UAI à déterminé également la définition d’une “planète naine” comme étant un corp céleste :
- qui est en orbite autour du soleil
- qui a une masse suffisante pour que sa gravité dépasse les forces du corps solide et qu’il se maintienne par équilibre hydrostatique sous une forme quasi-sphérique
- qui n’a pas nettoyé le voisinage autour de son orbite
- qui n’est pas un satellite (naturel of course de chevaux)
Puis, après, il y a les satellites naturels qui tournent exclusivement autour des planètes.
Et enfin, notre UAI précise qu’à l’exception des satellites naturels, tous les objets orbitant autour du Soleil seront collectivement considérés comme des petits corps du Systèmes Solaire.
Une planète est donc un corps céleste sphérique qui ne produit pas de lumière et qui gravite autour d’une étoile. Le système solaire compte huit planètes qui sont, dans l’ordre: Mercure, Vénus, Terre, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune.
Alors pourquoi Pluton a été déclassé comme planète et mise comme planète naine ?
Située à une distance moyenne de 5,9 milliards de km du Soleil – entre 4,3 et 7,4 milliards de km, soit entre 30 et 49 UA du fait d’une orbite très inclinée -, la planète naine Pluton entre dans l’orbite de Neptune lorsqu’elle est à son périhélie – le point de sa trajectoire le plus proche du Soleil.
L’astre se situe dans la ceinture de Kuiper, une zone d’objets célestes qui s’étend au-delà de l’orbite de Neptune, un peu comme la ceinture d’astéroïdes qui sépare Mars de Jupiter. Il ne satisfait pas à la dernière condition qui consiste à avoir nettoyé son orbite.
La reclassification de Pluton en planète naine déchaîne les passions depuis 2006. Une étude menée par des astronomes américains et publiée dans la revue scientifique Icarus soutient que Pluton n'aurait pas dû être retirée de la liste des planètes du système solaire.
Bon, l'engouement pour la situation de Pluton prend pour certains des allures politiques puisqu'il s'agit de la seule planète découverte par des scientifiques américains. Ils veulent donc la réhabiliter afin d'avoir dans leur catalogue la découverte d'une planète du Système Solaire…
Pour tenter de comprendre les différents processus ayant amené l'orbite de Pluton à se différencier de ses voisines, les scientifiques ont développé divers modèles afin de simuler le passé et le futur de l'orbite de la planète naine, mettant au passage en lumière une propriété étonnante protégeant Pluton d'une éventuelle collision avec Neptune : cette condition de résonance orbitale -- connue comme la résonance de moyen mouvement -- permet aux deux planètes de se situer à près de 90° de longitude céleste l'une de l'autre lorsqu'elles sont à une même distance héliocentrique.
De plus, le point qu'atteint Pluton à son périhélie se situe bien au-dessus du plan orbital de Neptune, faisant apparaitre ici un nouveau type de résonance orbitale connue sous le nom d'oscillation vZLK, en référence aux trois scientifiques ayant étudié le phénomène en tentant de résoudre le « problème des trois corps », visant à déterminer les mouvements relatifs de trois corps les uns par rapport aux autres à partir des lois de mouvement de Newton.
De nouvelles études réalisées à la fin du XXe siècle indiqueraient que l'orbite de Pluton serait chaotique -- des variations minimes dans les conditions orbitales initiales pourraient causer des divergences orbitales exponentielles en quelques dizaines de millions d'années. Mais ce chaos semblerait limité : les simulations numériques de l'orbite de Pluton tendent à montrer que les deux propriétés orbitales de Pluton précédemment mentionnées (la résonance de moyen mouvement, et l'oscillation vZLK) persisteraient sur des échelles de temps allant jusqu'aux milliards d'années, faisant de l'orbite de Pluton une orbite stable sur de grandes échelles de temps.
Mais les scientifiques ne parviennent toujours pas à comprendre les origines des surprenantes caractéristiques orbitales de Pluton (ainsi que celles des Plutinos, objets transneptuniens partageant des caractéristiques orbitales similaires à celles de Pluton). Plusieurs hypothèses ont pourtant vu le jour, à l'instar de la théorie de la migration planétaire, aujourd'hui communément acceptée, selon laquelle Pluton aurait été entrainée dans sa résonance actuelle de moyen mouvement par Neptune, lors de migration au début de l'histoire du Système solaire vers ses régions externes. Si cette théorie est valide, d'autres objets transneptuniens seraient susceptibles de partager cette même condition de résonance, ce qui a depuis été vérifié grâce à la découverte d'un grand nombre de Plutinos. Mais toujours pas d'éléments de réponse pour expliquer la forte inclinaison de l'orbite de Pluton !
Une équipe de chercheurs américano-japonaise a alors choisi d'intégrer les effets des autres planètes géantes de notre Système solaire (Jupiter, Saturne et Uranus) dans une nouvelle étude, afin d'identifier leurs éventuels impacts sur l'orbite de Pluton. Grâce à un modèle numérique simulant le futur de l'orbite de la planète naine sur plus de cinq milliards d'années et incluant huit combinaisons différentes de perturbations par les planètes géantes, les scientifiques sont parvenus à déterminer que les perturbations conjuguées générées par les trois planètes géantes -- Jupiter, Saturne et Uranus -- étaient nécessaires pour recréer l'oscillation vZLK de Pluton, l'arrangement des masses et des orbites des planètes géantes définissant une gamme étroite dans laquelle une telle oscillation serait possible.
“Ainsi, l'inclinaison orbitale de Pluton aurait pris naissance au cours de cette dynamique migratoire”
D'après les scientifiques, de tels résultats indiqueraient que les conditions orbitales des objets transneptuniens auraient été largement perturbées lors la période de migrations planétaires au début de l'histoire du Système solaire, permettant à une bonne partie d'entre eux -- dont Pluton -- d'être amenés à cet état d'oscillation vZLK. Ainsi, l'inclinaison orbitale de Pluton aurait pris naissance au cours de cette dynamique migratoire, mais les scientifiques ne parviennent pas à établir précisément les mécanismes à l'origine de telles particularités orbitales.
Cette découverte, montrant l'impact des orbites des planètes géantes sur les conditions orbitales des objets transneptuniens, pourrait motiver de plus amples études sur l'histoire migratoire des planètes géantes, et pourrait mener dans un futur proche à la découverte d'un nouveau mécanisme dynamique pouvant expliquer les origines de l'inclinaison orbitale de certains objets transneptuniens.
Voilà : à tes souhaits !
New Horizons est une sonde spatiale d’exploration du système plutonien (Pluton et ses satellites) ainsi que d’un ou plusieurs autres objets de la ceinture de Kuiper (région située au-delà de l'orbite de Neptune et qui contient des dizaines de milliers de corps glacés). Elle a été lancée en 2006 dans le cadre du programme New Frontiers de la NASA. Elle a survolé en juillet 2015 son objectif principal, Pluton (mission dite nominale), puis en janvier 2019 l’objet de Kuiper 2014 MU69 (mission étendue), nommé officiellement Arrokoth, en novembre 2019.
Les sept instruments scientifiques de la sonde ont permis pour la première fois d’étudier de près la surface, l’atmosphère et l’environnement proche de la planète naine Pluton, de ses cinq satellites et d’Arrokoth. Ils ont fourni des informations importantes pour la compréhension de la formation de notre système solaire.
Historique et trajectoire de New Horizons
Dès le programme Voyager (dont les deux sondes ont été lancées en 1977), destiné à l’exploration des planètes externes du système solaire, et jusqu’à la fin du XXe siècle, des projets vers Pluton ont été développés puis annulés. La NASA lance en 2001 une compétition pour une mission avec un premier survol de reconnaissance de Pluton, suivi de survols d’un ou plusieurs objets de la ceinture de Kuiper. Cette mission serait la première d’un nouveau programme d’exploration du système solaire, nommé New Frontiers. En novembre 2001, la NASA sélectionne la sonde New Horizons proposée conjointement par plusieurs scientifiques du Southwest Research Institute (SwRI), menés par Alan Stern, et par le laboratoire APL (Applied Physics Laboratory) de l'université Johns-Hopkins, à Laurel (Maryland). Après quatre ans de développement, le 19 janvier 2006, la sonde est lancée par une fusée Atlas V-551 de Cape Canaveral, en Floride. Lors de ce lancement, la sonde atteint une vitesse d’injection sur sa trajectoire de 16,26 kilomètres par seconde, record absolu pour un objet lancé par les humains depuis la Terre. Après neuf ans et demi de voyage et quelque 6,4 milliards de kilomètres parcourus, New Horizons survole Pluton le 14 juillet 2015 à une dizaine de milliers de kilomètres de sa surface. Durant son trajet, elle a effectué le survol d’un astéroïde (132524 APL) en juin 2006 ainsi que celui de Jupiter, le 28 février 2007, pour bénéficier de l’assistance gravitationnelle de cette planète géante afin de modifier sa direction et augmenter sa vitesse tout en économisant du carburant. La phase d’observation du système plutonien a duré en tout six mois et le survol à proprement parler de Pluton une journée. Quelques mois plus tard, New Horizons est légèrement déviée pour atteindre et survoler, à 3 500 kilomètres de distance, l’objet 2014 MU69 le jour de l’an 2019.
Le vaisseau spatial et sa charge utile
La sonde spatiale New Horizons est relativement légère, avec seulement 478 kilogrammes dont 30 kilogrammes d’instruments scientifiques et 78 kilogrammes de carburant.
Sa charge utile comprend sept instruments :
– un télescope imageur panchromatique (LORRI, Long Range Reconnaissance Imager) conçu avec une haute résolution spatiale et une grande sensibilité pour établir la cartographie de Pluton ;
– un instrument, Ralph, composé d’un imageur polychromatique dans le domaine du visible (MVIC, Multi-spectral Visible Imaging Camera) et d’un spectromètre imageur dans le domaine du proche infrarouge (LEISA, Linear Etalon Imaging Spectral Array) permettant de fournir des informations de composition sur la surface ;
– un spectrographe à imagerie dans le domaine de l’ultraviolet (Alice) pour l’analyse de la composition de l’atmosphère ;
– un équipement de science radio utilisant l’antenne de la sonde (REX, Radio Experiment) pour l’étude des profils atmosphériques de température et de pression ;
– un spectromètre mesurant la composition et l'énergie des ions et électrons (PEPSSI, Pluto Energetic Particle Spectrometer Science Investigation) ;
– un spectromètre analysant les particules à basse énergie du vent solaire (SWAP, Solar Wind Around Pluto) ;
– un compteur de poussières cosmiques (VBSDC, Venetia Burney Student Dust Counter).
Une antenne de seulement 2,1 mètres de diamètre a finalement été sélectionnée pour les télécommunications et la transmission des données vers la Terre. La récupération de l’ensemble des 55 gigabits de données collectées durant le survol du système de Pluton – à une distance de la Terre égale à trente-trois fois celle qui sépare notre planète du Soleil – a duré dix-huit mois.
Principales découvertes
La mission New Horizons a survolé, l’un après l’autre, le plus gros objet connu de la ceinture de Kuiper, Pluton (quelque 2 375 km de diamètre), et l’un des plus petits, Arrokoth (20-30 km). Les observations effectuées durant ces survols ont radicalement enrichi notre connaissance de la surface et de l'atmosphère de Pluton, tout comme de son système de satellites et promettent d’apporter des informations cruciales sur les premières étapes de la formation du système solaire.
Pluton a été découvert en 1930 par l’Américain Clyde Tombaugh après une recherche systématique de la « planète X » dont l’existence était à l’époque supposée expliquer les perturbations de l’orbite d’Uranus. Puis, après la mise en évidence des premiers objets de Kuiper de taille similaire, comme Éris, le statut de Pluton, considéré jusqu’alors comme la neuvième planète du système solaire, a été remis en question. En 2006 (année de lancement de la sonde New Horizons), l'Union astronomique internationale (UAI) déclasse Pluton et en fait alors la première représentante d’une nouvelle catégorie d’objets célestes : les planètes naines.
À partir de 1976, soit bien avant le survol par New Horizons, plusieurs composants de la surface de Pluton – le méthane, l’azote, le dioxyde de carbone et un composant carboné rouge sombre – ont été détectés et quantifiés à l’aide d’observations télescopiques dans le domaine infrarouge. Une première carte globale a même été obtenue en 1994 par le télescope spatial Hubble, mais à très basse résolution. Les évolutions de la composition de la surface et de la pression atmosphérique de Pluton, suivies depuis la Terre à partir des années 1990, laissaient présager une géomorphologie de surface dominée principalement par la sublimation (passage de l’état solide à l’état gazeux sans passer par la phase liquide) de la glace d’azote, son transport atmosphérique et sa condensation dans les zones polaires à l’ombre.
Grâce à ses instruments, la mission New Horizons a bien documenté la géologie de l’hémisphère survolé de Pluton, dit « hémisphère opposé à Charon ». Elle y a révélé une étonnante diversité de paysages, bien plus riche et active que celle de Triton – objet de Kuiper capturé par Neptune –, très proche de Pluton en ce qui concerne la taille et la composition. La surface de Pluton est ainsi parsemée de structures géologiques très variées : plaines, cratères de tous types, failles tectoniques, chaînes de montagnes, réseaux de vallées, plateaux, falaises, cryovolcans...
La structure géologique la plus imposante, au centre de l’hémisphère survolé, est l’immense plaine glaciaire ovale Sputnik Planitia (900 × 1 500 km). Ce cratère d’impact géant, rempli de glace d’azote contenant de faibles quantités de méthane et d’oxyde de carbone, est entouré de chaînes de montagnes dont certaines peuvent dépasser les 5 000 mètres d’altitude. Des glaciers d’azote actifs s’écoulent vers la plaine depuis les montagnes situées à l’est et d’autres la quittent pour pénétrer d’autres montagnes plus au nord.
Mais la structure géologique la plus surprenante est bien la présence de cellules de convection de glace d’azote sur une grande partie de Sputnik Planitia. Les températures, plus chaudes au fond du cratère, créent un mouvement ascendant très lent de la glace d’azote, peu visqueuse même aux très basses températures mesurées à la surface de Pluton (– 235 à – 215 0C). Sur cette plaine flottent de petites montagnes de glace d’eau car l’azote a une densité très proche de celle de l’eau liquide.
Une autre structure étonnante est celle des « terrains en lame », plus à l’est, composée de crêtes quasi parallèles de glace de méthane de plusieurs centaines de mètres de hauteur et dizaines de kilomètres de longueur qui pourraient s’étendre sur une grande partie de la zone tropicale nord de Pluton. Cette ceinture tropicale n’est interrompue que par la vaste étendue de matière carbonée rougeâtre et sombre recouvrant un socle de glace d’eau, à l’ouest de Sputnik Planitia. De très nombreuses autres structures géologiques parsèment la surface, comme des failles éruptives (Virgil Fossae, à l’ouest de Viking Terra...), des cryovolcans (Wright Mons et Piccard Mons), des réseaux de vallées dendritiques (Pioneer Terra...) et même un potentiel lac gelé au sein d’al-Idrisi Montes.
La distribution des diverses glaces à la surface de Pluton est aussi le témoin des différents cycles de sublimation et transport atmosphériques de l’azote et du méthane aux échelles saisonnières, climatiques (cycles climatiques de Milanković liés aux variations de l’obliquité et de l'excentricité de la planète naine et à la précession de son axe de rotation) et géologiques. L’atmosphère de Pluton – essentiellement constituée d’azote, de méthane et de monoxyde de carbone – est le siège d’une photochimie (réactions chimiques sous l’action de la lumière ultraviolette) produisant des hydrocarbures et nitriles simples ainsi que des composés carbonés complexes engendrant les nombreuses couches de brumes observées. Ces composés formés dans l’atmosphère sédimentent rapidement et s’accumulent au sol où ils peuvent avoir constitué, sur de vastes zones, une couche pouvant atteindre une dizaine de mètres d’épaisseur.
Charon, officiellement le plus grand satellite de Pluton, identifié dès 1978, est parfois considéré – du fait de sa taille proche de celle de Pluton et de ses caractéristiques orbitales – comme élément d’un système binaire de planètes naines, Pluton-Charon. Il présente des structures tectoniques impressionnantes atteignant plus de 7 kilomètres de profondeur, comme Mandjet Chasma, une structure de plus de 450 kilomètres de longueur et 30 kilomètres de largeur créée peu après la formation de Charon.
Une découverte étonnante fut celle de l’existence de matière carbonée concentrée sur un des pôles de Charon. Sa présence a été expliquée par l’échappement de méthane de l’atmosphère de Pluton, dont une partie atteint Charon et est piégée par le froid (température atteignant jusqu’à – 260 0C) régnant sur ce pôle plongé dans la nuit polaire. Ce méthane, alors soumis au rayonnement ultraviolet, est converti en un matériau carboné complexe et rougeâtre. New Horizons a néanmoins confirmé l’absence d’atmosphère au-dessus de la surface de Charon, du fait de sa plus faible gravité.
Outre Charon, Pluton possède quatre autres satellites plus petits découverts par le télescope spatial Hubble : Nix et Hydre en 2005, peu avant le lancement de New Horizons ; Kerbéros en 2011 et Styx en 2012, respectivement quatre et trois ans seulement avant le survol de Pluton par cette sonde spatiale. Les observations de New Horizons ont montré que ces satellites de forme allongée sont en rotation rapide autour de leur axe qui est très incliné par rapport à celui de Pluton. Ils tournent autour de Pluton sur des orbites circulaires avec des périodes très proches de multiples (3, 4, 5, 6) de la période orbitale de Charon. Ces observations ainsi que la quantité de cratères observée à leur surface et leur composition, très riche en glace, privilégient leur formation lors de l’impact de deux corps partiellement différenciés, précurseurs de Pluton et Charon.
New Horizons est certainement la seule mission de l’histoire spatiale à avoir effectué un survol rapproché (3 500 km) d’un objet dont l’existence était totalement inconnue lors de son lancement, puisque Arrokoth n’a été découvert qu’en juin 2014 par le télescope spatial Hubble. Les images de New Horizons ont révélé un objet bilobé avec un « cou » plus brillant reliant les deux lobes et une forme très aplatie pour l’un d’eux. Le plus grand lobe, de forme lenticulaire, a des dimensions d’environ 20 × 20 × 7 kilomètres alors que le plus petit est plus proche de la sphère avec 14 × 14 × 10 kilomètres. La période de rotation de cet objet céleste double est de 15,9 heures autour d’un axe pratiquement dans le plan de son orbite.
Mis à part un grand cratère, la géologie de la surface d’Arrokoth est peu prononcée, avec la présence subtile de plusieurs unités géologiques, quelques petits cratères ainsi que quelques zones plus brillantes. Ce petit objet de Kuiper est relativement sombre car il ne réfléchit qu’environ 6 p. 100 de la lumière solaire et absorbe le reste. Des glaces d’eau et de méthanol sont potentiellement détectées. La surface ne présente néanmoins que très peu d’hétérogénéité de couleur et de composition entre les deux lobes, mettant en évidence une origine commune des deux objets les constituant. Les caractéristiques d’Arrokoth (membre de la famille des « objets classiques » de la ceinture de Kuiper – donc potentiellement très primitifs –, en orbite peu inclinée et quasi circulaire à grande distance de Neptune) en font un objet binaire de « contact », avec les deux lobes formés à proximité l’un de l’autre, entrant en orbite mutuelle puis se rejoignant après dissipation progressive de leur énergie orbitale. Elles favorisent la théorie d’une formation à partir de l’effondrement d’un nuage de blocs constitués de grosses particules formées de glaces et de minéraux et l’agglomération de deux d’entre eux à très basse vitesse, ceux-ci étant alors probablement en rotation synchronisée.
Avec les images fournies par New Horizons, Arrokoth est devenu le corps céleste le plus lointain exploré par les humains. Son nom officiel (décerné en novembre 2019 par le Minor Planet Center de l’International Astronomical Union) signifie ciel en langue algonquienne de Virginie. Arrokoth était précédemment surnommé Ultima Thulé par l’équipe de New Horizons.
Depuis 2006, la décision oppose en réalité deux camps. Certains chercheurs estiment que maintenir Pluton dans le club des planètes du système solaire implique d'en intégrer un certain nombre d'autres qui remplissent les mêmes critères que Pluton. Mais ces prétendantes sont nombreuses, jusqu'à plusieurs dizaines, selon les conditions que l'on applique. L'autre camp estime que cette nouvelle définition des planètes nie les dernières découvertes scientifiques. La revue Icarus critique les critères mis en place par l'UAI.
Selon les auteurs de l'étude de la revue Icarus, la présence d'objets sur l'orbite de Pluton ne devrait pas l'empêcher de rester parmi les planètes du système solaire. Ils avancent que l'on devrait se concentrer sur les caractéristiques intrinsèques à chaque objet céleste plutôt que de prendre en compte ce type de critère. Philip Metzger et ses co-auteurs, suggèrent ainsi à l'Union astronomique internationale d'"arrêter sa définition non scientifique et arrêter d'enseigner une histoire révisionniste de ses origines".
Ils soutiennent par ailleurs que des astronomes utilisent la terminologie "planète" pour certains objets lointains qui ne respectent pas la définition admise au niveau international, ce qui, selon eux, appelle à un nouveau débat.
L'affaire n'est pas seulement celle de quelques chercheurs américains d'ailleurs. Jim Bridentsine, administrateur de la Nasa entre 2018 et 2021, expliquait lui-même en 2019 qu'il estimait toujours que Pluton était une planète. "C'est comme cela que je l'ai appris", justifiait-il alors.
Comme tu l'as bien compris, cette question de nomenclature autour de la planète naine divise donc encore la communauté scientifique.